Sur la saga des reports

L’année académique 2019-2020, avant la crise du Covid, a été marquée, sur le plan de la gouvernance à l’ULB, par ce que l’on a appelé la « crise des reports ». Il nous semble important d’informer nos collègues du combat que la délégation du corps académique a mené dans un contexte difficile. La saga de ce dossier, ardu et technique, fait ici l’objet d’un récit de l’un des membres de la délégation. Outre le fait que ce texte a pour objectif de donner des éléments factuels et un éclairage sur le travail qui a été le nôtre, il transmet, sans fard, le regard d’un nouvel élu découvrant ce monde de l’intérieur.

La délégation académique

Quelques mots en préambule. Pour rappel, votre délégation académique a été élue au cours d’élections qui se sont tenues en décembre 2019. Si, parmi ses 19 membres, on compte quelques scaphandriers chevronné.e.s, habitué.e.s aux plongées profondes au cœur des CA, CoA et autres GT, la plupart d’entre nous n’étaient, en janvier 2020, que des néophytes à peine capables de retenir leur souffle quelques secondes. Cependant, nous ne dûmes pas longtemps attendre pour connaître notre baptême de l’eau et du feu.

Le problème des reports en général – et des reports dit-facultaires en particulier – est ancien et pour le moins complexe.

Au début de chaque année civile, traditionnellement en février, les autorités présentent au CA un budget initial – combien d’argent est disponible et comment on pourrait le dépenser? – de l’année en cours (soit 2020). Quelques mois plus tard, les comptes – combien a-t-on dépensé, comment, et combien reste-t-il?) de l’année fiscale précédente (soit 2019 dans ce cas) sont également présentés au CA, sur base desquels des ajustements au budget initial sont réalisés, puisqu’on a alors une meilleure vision des dépenses et recettes réelles de l’année précédente, mais aussi des éventuels boni réalisés, qui peuvent alors être réinjectés dans le budget de l’année suivante pour augmenter certaines lignes ou en créer d’autres pour lancer de nouvelles initiatives. Ces ajustements mènent donc au budget ajusté – comment va-t-on dépenser l’argent disponible?-, qui est lui voté au cours d’un CA de l’été. Clairement, ce sont les autorités, en collaboration avec le DAF – Département de l’administration financières – qui établissent le budget qui, idéalement, doit être à l’équilibre, ou tout au moins ne pas afficher de déficit trop important. C’est le signe d’une gestion saine. Aussi, un délégué du gouvernement (un homme, en ce moment), qui siège en tant qu’observateur au CA, veille à ce qu’il en soit bien ainsi.

Or, en février 2020, le budget n’était pas à l’équilibre. Tout d’abord, l’ONSS – Office national de sécurité sociale – venait de présenter une créance inattendue due au Tax shift (cf ci-dessous). Ensuite, en 2019, les administrateurs s’étaient engagés à ce qu’un vaste et ambitieux plan IT – Technologies de l’information – soit financé à partir de 2020. Bien qu’une estimation du coût de ce plan et des pistes de financement aient été présentées aux administrateurs alors en fonction, les détails n’en seraient clarifiés que lors de la législature suivante, soit en 2020.

C’est là que surgit la problématique des reports

Depuis plusieurs années, les comptes de l’université affichent sur leur bilan un montant dit « de reports », qui regroupe l’ensemble des montants non-dépensés lors de l’année fiscale précédente et reportés dans le budget de l’année en cours, sans que la destination finale en soit toujours explicitée. Pour l’administration, il peut s’agir de montants qui ont déjà une destination (une dépense X), qui ne s’est pas réalisée l’année A mais le sera durant l’année A+1. Donc, on reporte le montant au budget de l’année suivante, et comme la destination est spécifiée, on parle alors de report justifié ou affecté. Pour le secteur académique, il peut s’agir d’un montant que l’on préserve, en prévision d’une dépense ultérieure précise (workshop, équipement, etc.). Dans ce cas, ces montants ont donc une destination précise, mais les outils comptables actuels ne permettent pas de le spécifier, si bien que ces reports, bien qu’affectés dans les faits, sont considérés comme non-justifiés. Parfois, ces montants n’ont pas (encore) de destination définitive. En d’autres mots, on épargne. Ceci est largement justifié par notre pratique des financements pour la recherche, l’enseignement, etc (en tout cas, c’est la ligne que la délégation académique a défendue). Un grant, une bourse, ne permettent en effet pas d’acheter une chaise de bureau, voire un ordinateur pour un secrétariat. Quoi qu’il en soit, et dans tous les cas, ces montants reportés apparaissent dans une ligne comptable globale, dite de reports non-justifiés. Pour ce qui concerne les reports associés à des crédits facultaires, le montant moyen par enseignant-chercheur est modeste. Multipliés par 3000 enseignants et chercheurs, ils deviennent conséquents.

En quoi les reports présentent-ils un problème?

A priori, des reports non-justifiés importants (un pourcentage non-nul du budget de l’université) font tache dans un bilan comptable. La Cour des comptes a soulevé plusieurs fois le problème, tout en comprenant le caractère somme toute « naturel » de reports non-justifiés associés à des activités académiques (recherche & enseignement). Il faut cependant comprendre que cette pratique n’est pas orthodoxe, en particulier si l’on vient du monde extérieur (industrie, fonction publique,..). De fait, bien indépendamment de la bonne volonté et de la rigueur des gestionnaires de comptes (la fameuse gestion « en bon père de famille »), notre pratique, qui est de facto cautionnée par nos autorités depuis des temps immémoriaux, prête le flanc à la critique « qui tue » : il s’agit d’argent public, et s’il n’est pas dépensé (ou engagé…), c’est qu’il n’était pas nécessaire et doit donc retourner dans un budget centralisé pour être affecté à une dépense bien identifiée.

La position des autorités de l’ULB

Il va sans dire que régler le problème des reports non-justifiés permettait de faire d’une pierre deux coups. Financer le plan IT, rembourser la dette ONSS, présenter un budget équilibré et « assainir » (le mot n’est pas de notre délégation) le mode de gestion des académiques. A ce propos, il convient de souligner que le problème des reports non-justifiés ne concernait pas que les facultés et leurs académiques, mais aussi, et très largement, l’administration, y compris centrale. Ensemble, ces reports avaient augmenté de manière substantielle au cours des dernières années. Il y avait donc là une situation de crise budgétaire.

Quels ont été notre rôle et notre position?

A ce stade, les détails du calendrier des évènements deviennent important.

Le budget initial 2020 devait faire l’objet du CA du 10 février dernier. Celui-ci aurait dû être essentiellement à l’équilibre, mais à moins d’une semaine du CA, ce ne fut soudainement plus le cas, suite à une facture inattendue de l’ONSS (résultant d’un effet combiné du récent Tax Shift et d’une mesure prise en 1984 par le Gouvernement Martens-Gol pour compenser une législation défavorable aux universités libres, compensation remise en question suite au Tax Shift qui a dès lors et malencontreusement un effet net négatif pour les universités libres… ).

Un budget initial fortement en déficit n’aurait pas été accepté par le délégué du gouvernement, mais les autorités avaient en réponse un projet clair et radical : acter dès ce CA la décision qu’aucun report non-justifié ne serait réalisé en 2020, pour permettre de récupérer les montants et dès lors, non seulement équilibrer le budget ajusté, mais également financer l’intégralité du plan IT! Pour de nombreux collègues, et en particulier les Doyen.ne.s, qui ont été avertis de la proposition en amont du CA (rappelons que, contrairement à notre délégation, les Doyen.ne.s ne siègent pas au CA mais seulement au CoA où elles et ils sont consulté.e.es sur les questions budgétaires), la mesure était inacceptable tant elle risquait de ruiner à court ou moyen termes de très nombreux projets pédagogiques ou scientifiques. Sans compter le fait que le financement du plan IT n’avait pas été très clairement motivé par les autorités en dehors des instances, et que la mesure de saisie des reports elle-même semblait passer pour une incrimination des académiques et de leur gestion financière.

Cependant, – reflet de la diversité de notre université -, le front des Doyen.ne.s n’était pas unanime, de sorte que la ligne de conduite de notre délégation a dû d’emblée être celle de la recherche d’un compromis. La première concession faite par les autorités aux Doyen.ne.s, dès le week-end précédent le CA du 10 février, était de limiter la suppression des reports facultaires à 50% pour 2020, tout en supprimant ces reports à 100% à partir de l’année suivante. Pour ce qui était des reports non-justifiés hors-facultés, les pourcentages devaient être plus élevés (de 80 à 100%, mais il faut rappeler qu’un mécanisme de justification des reports existe au niveau de l’administration générale, mécanisme inexistant pour les reports des crédits facultaires). La situation restait inacceptable pour certains Doyen.ne.s, et clairement pour nombre de nos collègues, mais pas tou.te.s ; à partir de ce point, il s’agissait surtout pour nous de déterminer jusqu’où il nous serait possible de faire changer ces pourcentages tout en prenant comme position fondamentale que les reports facultaires avaient leur raison d’être.

Nous avons travaillé dès lors suivant plusieurs axes, avec, nous devons bien l’admettre des résultats mitigés.

Tout d’abord, au cours de plusieurs réunions avec les autorités, mais aussi avec les Doyen.ne.s, nous avons tenté de différencier les reports facultaires des reports non-facultaires, leur raison d’être, leurs spécificités, voire leurs évolutions différentes au cours des années. Ce labeur a mobilisé une énergie considérable, tant du côté des Doyen.ne.s, que de notre délégation. Mais, il faut l’admettre, il s’est avéré in fine peu constructif. A ce titre, il faut comprendre et apprécier que la démocratie au sein de notre institution passe par une représentativité, au sein du CA et du CoA, outre du corps académique, de l’ensemble des corps (étudiants, scientifiques, administratif et gestion) ainsi que de plusieurs membres cooptés. Convaincre, obtenir un consensus, voire construire une unité, sont des exercices délicats et difficiles. Nous reviendrons sur ce point plus loin.

Ensuite, nous avons œuvré à la mise en place d’un GT, dont la fonction serait la mise en place d’un système comptable approprié pour la gestion des reports, en particulier des reports facultaires, renommés provisions facultaires. C’était la moindre des choses. Notre volonté était d’obtenir que le GT puisse œuvrer sur le long terme, et en particulier puisse proposer, en collaboration étroite entre gestionnaires de comptes, académiques, Doyens, et représentants du DAF et des autorités, une bonne gestion comptable des provisions nécessaires au fonctionnement des groupes de recherches, à l’instar de ce qui se fait dans d’autres universités. Sur ce point, nous avons rapidement obtenu gain de cause, même s’il restait à régler le mode de fonctionnement du GT.

Enfin, nous avons demandé que le plan IT ne soit pas financé dans son intégralité. Ce point est technique mais important. Le plan IT devant être réparti sur plusieurs années, il était possible, et cela avait d’ailleurs été envisagé par les autorités elles-mêmes, de ne le financer qu’en partie (voire pas du tout, cf ci-dessous) en 2020. Malgré tout, déplacer ce curseur était difficile, les autorités pesant de tout leur poids sur ce dossier.

Et alors surgit la crise informatique…

On l’a presque oublié, mais début mars 2020, notre université a été quasiment paralysée, et ce pendant environ deux semaines, par un grave virus informatique. Dès lors, le plan IT devenait incontournable, et manifestement il ne s’agissait plus de discuter sa raison d’être…

Puis la crise sanitaire…

Alors que les négociations avec les autorités avançaient, et que nous prenions des contacts avec nos collègues, tant au sein des départements que des facultés, et que notre action était appuyée par des motions émanant de certaines facultés, le Covid-19 a débarqué en Belgique. Tout d’un coup, les conditions de travail de chacun.e d’entre nous, mais aussi de gestion participative au sein de l’université, se sont trouvées compliquées. Malgré cela, et malgré un quotidien familial chargé et stressant à gérer pour nombre d’entre nous, nous avons poursuivi nos travaux d’élus.

Peu de temps avant le début du confinement, le 5 mars, les administrateurs ont reçu une lettre signée par un groupe de 7 Doyen.ne.s contenant une contre-proposition à celle des autorités, s’articulant en deux grands principes : d’une part, diminuer le déficit du budget initial en supprimant certaines nouvelles initiatives, prévues avant la mauvaise nouvelle de l’ONSS et les crises informatique et sanitaire, et donc peut-être moins pertinentes à la lumière de ces nouvelles données ; d’autre part, ne programmer sur le budget 2020 que la première année de financement du plan IT, ce qui permettait de réduire le prélèvement sur les reports facultaires à 13%. Cette proposition étant radicalement opposée à celle des autorités, nous avons œuvré à trouver un compromis qui pourrait être accepté par la majorité des membres du conseil d’administration.

Tout d’abord, une demande conjointe, exprimée à l’unanimité en inter-corps, a été adressée aux autorités pour qu’un budget initial à l’équilibre soit présenté au CA, au tout début de la crise sanitaire. Cela devait être la dernière tenue du CA en présentiel. Les autorités en ont pris acte et grâce au travail colossal du DAF, réalisé dans un temps très bref et dans les circonstances difficiles, un budget à l’équilibre pouvait être présenté au CA du 16 mars. Malgré ces économies qui permettaient d’équilibrer le budget, la pilule restait amère pour les facultés : en vue de financer la totalité du plan IT via les reports non-justifiés, il était prévu de prélever 33% sur les reports facultaires. C’était difficile à accepter dans la forme, surtout que de nombreux administrateurs ne trouvaient plus critique de discuter du financement du plan IT dans l’urgence vu que le budget initial était alors à l’équilibre, et que ce plan ne pourrait de toute façon pas être financé avant l’approbation des comptes 2019 et le budget ajusté qui en découlerait pendant l’été. Les nerfs étaient à vif au cours de ce CA, ce qui est compréhensible étant donnée l’accumulation des dossiers et des problèmes.

A l’issue de ce CA, la situation était passablement bloquée, la défiance étant de mise entre les autorités d’une part, certain.e.s Doyen.ne.s d’autre part, et enfin les délégations des différents corps de l’université dont la nôtre. Néanmoins, un CA extraordinaire fut convoqué pour le 23 mars, CA qui aurait lieu pour la première fois par visioconférence vu que le confinement avait commencé. Il n’était pas question de ne pas trancher. Quelques jours après, le corps étudiant signifiait dans un courrier à l’ensemble des représentants qu’il prenait parti pour le plan mis sur la table par les autorités, soit 33% de non-report en 2020.

Dans la foulée, une proposition alternative de budget initial nous parvenait de la part des autorités. Elle incluait un financement de l’intégralité du plan IT, mais au prix de sacrifices importants dans de nombreux secteurs de notre institution. Cette proposition nous paraissait trop radicale alors que, depuis le début, nous plaidions pour une solution collaborative. Finalement, la veille-même du CA, une nouvelle lettre était adressée par 8 Doyen.ne.s aux administrateurs, les invitant à tirer les conséquences du drame social et économique qui s’annonçait suite à la crise sanitaire, et dès lors à reconsidérer toutes les dépenses non vitales, y compris celles votées précédemment comme le plan IT, et à reporter l’entièreté des soldes non-dépensés, en vue de permettre à l’Université de se recentrer sur ses missions essentielles, la recherche et l’enseignement. Il y avait donc, à ce moment-là, trois propositions sur la table des administrateurs : deux propositions des autorités en plus de celle de Doyen.ne.s.

Ce que nous avons proposé. Et ce qui a changé

Ce qui n’était pas clair, c’était de savoir si la proposition de ce groupe de Doyen.ne.s aurait pu passer le cap d’un vote. L’argument de ces Doyen.ne.s avait néanmoins le mérite d’être clair : la situation sanitaire laissant présager une période de vaches maigres, il était impératif que l’université ne s’engage pas sur la voie de nouvelles dépenses, et surtout ne bloque pas de fonds importants pour financer un plan IT dont certaines dépenses ne seraient pas réalisées avant plusieurs années. La crise sanitaire rendait la gestion de ce dossier extrêmement difficile, voire impossible. Aussi, les appuis ou tout au moins la sympathie que nous espérions pouvoir trouver pour notre ligne d’argumentation semblaient faire défaut. C’est dans cet état d’esprit que nous avons finalisé notre propre proposition, rédigée durant plusieurs heures dimanche 22 mars, et envoyée ce même dimanche (!) aux membres du CA.

Voici, en substance, ce que nous proposions :

  • financer les deux premières années (au lieu de 4 années) du Plan IT, concernant la majorité des dépenses.
  • préserver 100% des reports facultaires
  • mettre en place un GT dont la fonction principale serait d’étudier la gestion des provisions facultaires
  • dégager un fonds d’urgence en soutien à la situation sanitaire de crise, notamment pour venir en aide à l’hôpital universitaire ; ceci serait réalisé en diminuant le montant des crédits facultaires globalisés de 33% dans le budget initial 2020.

C’était ce qu’on pourrait appeler un compromis, mais que pour notre part nous espérions être une troisième voie, ou en tout cas une manière de sortir de ce « bourbier » par le haut. Compromis dans le sens où les Facultés cédaient moins que ce que demandaient les autorités, mais plus que certain.e.s Doyen.ne.s ne le proposaient. Nous maintenions néamoins notre principe de base qui était de défendre la bonne gestion faite par les académiques et scientifiques des (maigres, apparemment en comparaison avec d’autres institutions proches) moyens que l’institution nous attribue. Aussi, nous mettions la solidarité au cœur de notre proposition. Enfin, nous reconnaissions la nécessité de financer un secteur trop longtemps délaissé par notre institution, n’en déplaise à ce que nous entendons parfois.

Ce qui a été finalement obtenu et ratifié au CA et au CoA fut le résultat d’un dernier amendement des autorités sur notre propre proposition: on gardait un financement du plan IT limité aux deux premières années, le principe du fonds d’urgence financé par réduction des crédits facultaires, mais les autorités y ont ajouté un prélèvement de 13% sur les reports facultaires, comme proposé dans la première lettre des Doyen.ne.s. Ce résultat n’est certes pas satisfaisant, mais à ce stade il ne nous a plus paru possible d’aller plus loin.

Qu’avons-nous appris ?

C’est difficile à dire…

What did we learn?

Rétrospectivement, nous nous sommes trouvé dans une situation de blocage, largement à cause de la séparation entre l’acceptation de principe du plan IT, décidé en 2019, et la discussion de son financement (rapporté en 2020). Dès lors, la question devenait un problème de technique budgétaire et non plus de principe. La coïncidence de ce dossier budgétaire avec un problème informatique grave, qui mettait une fois de plus notre institution sur la sellette, mais aussi une défiance (très justifiée selon nous) d’une large partie de notre communauté vis-à-vis des monopoles de grands groupes informatiques, encore exacerbés par la marche forcée vers le télé-enseignement, ainsi que la gestion et la recherche virtuels, n’ont clairement pas contribué à installer un débat serein, ni avec les autorités, ni avec nos collègues, y compris des départements techniques, administratifs et de gestion.

Avec plus de temps, nous serions probablement arrivés à un résultat plus satisfaisant, mais le temps est ce qui nous a manqué le plus. Anticiper mieux, informer plus, voilà peut-être ce que nous retirons de cette expérience. Plus que jamais nous pensons que la démocratie vraie repose sur une implication large et informée, de toutes et de tous, quant aux engagements de notre institution.

Refinancer (enfin!) les universités!

Le texte ci-dessous fait l’objet d’une pétition qui émane de notre délégation.

Pour signer: http://chng.it/QW9fBMSJRF

Madame la Ministre Valérie Glatigny,

La situation dans laquelle se trouve l’éducation en général et l’université en particulier depuis le début de la crise sanitaire que nous traversons est inédite. La pandémie surgit dans un contexte où les universités souffrent d’une insuffisance patente de moyens depuis de nombreuses années. En dix ans, la population universitaire a augmenté de 40 % alors que les budgets alloués aux universités ont stagné : le financement par étudiant.e n’a donc cessé de diminuer. Globalement, les études montrent que, depuis plus de dix ans, la Fédération Wallonie-Bruxelles a un taux de financement de l’enseignement supérieur des plus bas.

Face à cette crise sans précédent, un investissement dans la recherche liée au COVID-19 vient d’être réalisé – ce dont nous nous réjouissons – et les universités ont consenti à investir dans l’infrastructure et le soutien au personnel enseignant. Mais ce sont en réalité toutes les disciplines enseignées et la recherche dans leur globalité qui sont touchées et doivent aujourd’hui être soutenues. Cela ne nécessite pas uniquement un appui logistique, matériel et un soutien pédagogique, mais aussi plus de moyens humains, c’est-à-dire l’engagement d’enseignant.e.s-chercheur.e.s et d’assistant.e.s d’enseignement et de travaux pratiques qui font aujourd’hui cruellement défaut. En effet, la situation oblige à repenser profondément l’enseignement et la pédagogie universitaire vers un encadrement personnalisé, afin de soutenir tou.te.s les étudiant.e.s et leur permettre de suivre leur cursus de manière adéquate. Pour ce faire, en plus de l’utilisation de moyens digitaux, les cours et leur encadrement devront impérativement être démultipliés si nous souhaitons maintenir un niveau d’excellence et un accompagnement adéquat pour toutes et tous. La crise actuelle ne fait qu’accentuer et rendre d’autant plus visibles des problèmes structurels présents de longue date.

Nombre de signataires de la présente lettre ainsi que nos collègues sont aujourd’hui proches du burn-out et sont las de devoir « faire avec les moyens du bord ». Nous, enseignant.e.s du supérieur et chercheur.e.s, nous sommes engagés dans un processus exceptionnel. Nous avons en un temps record dû penser un renouvellement, une réorganisation et une réinvention en profondeur de nos tâches. Cependant, de tels efforts ne peuvent être poursuivis dans la durée sans un réel soutien de nos autorités de tutelle. En la matière, seule une politique d’engagement pro-active permettra de répondre aux demandes légitimes des étudiant.e.s et permettra aux collègues enseignant.e.s chercheur.e.s d’assumer leurs missions avec professionnalisme et bienveillance, sans risquer de mettre leur santé en danger.

En outre, la recherche est une mission fondamentale de l’université, et les enseignant.e.s sont aussi chercheur.se.s. Or, depuis trois mois, toutes les énergies ont été captées par la réorganisation des cours et évaluations à distance et nous avons dû massivement laisser nos activités de recherche de côté. Si nous voulons que les laboratoires et centres de recherche reprennent une activité digne de ce nom et responsable envers notre avenir commun, il est crucial que des moyens nouveaux y soient consacrés.

Nous demandons donc qu’à la gestion de l’urgence succède une véritable politique en faveur de l’enseignement supérieur et de la recherche, qui permette de garantir un soutien et un suivi des étudiant.e.s, des conditions de travail dignes pour toutes et tous et de maintenir les capacités de recherche des établissements.

En janvier 2020, vous affirmiez : « Il ne faut pas imposer une politique d’austérité à l’enseignement supérieur et à la recherche scientifique car ce serait comme renoncer à investir dans le futur de nos jeunes ». Le moment est venu de soutenir le futur de nos jeunes, avant qu’il ne soit trop tard.

Contacts:

Vanessa Frangville, Vanessa.Frangville@ulb.ac.be

Damien Scalia, damien.scalia@ulb.ac.be

Nicolas Verschueren, niversch@ulb.ac.be

Autres actions

Un appel interuniversitaire : Pour le déconfinement de nos universités !

Une initiative qui émane de l’atelier des chercheur.euse.s pour une désexcellence des universités : Non à la rentrée virtuelle à l’ULB !

Un appel d’étudiant.e.s à interpellation de la Ministre et des Autorités académiques : No one fails !